Un été olympique : à la rencontre de sculptures médaillées

De 1912 à 1948, des épreuves consacrées aux arts faisaient partie du programme olympique : l’occasion pour deux œuvres du musée des Années 30 de remporter une médaille !

C’est le début des grandes vacances ! Avant de se plonger dans les Jeux olympiques et paralympiques de cet été, les musées municipaux de Boulogne-Billancourt vous proposent de (re)découvrir leurs collections à travers le prisme du sport.

Présenté jusqu’au 8 septembre 2024, le parcours Artistes, à vos marques, prêts… Partez ! offre un point de vue inédit sur l’histoire artistique, culturelle et sociale des premières décennies du XXe siècle. Tout au long de l’été, retrouvez des focus sur quelques-unes des œuvres de ce parcours glorifiant le corps sportif et un nouveau phénomène de société de l’entre-deux-guerres.

 

Désireux d’harmoniser les arts et les lettres avec le sport, Pierre de Coubertin (1863-1937) est à l’origine de compétitions artistiques intégrées au programme des Jeux olympiques modernes, Jeux qu’il a par ailleurs rénovés en 1896. De 1912 à 1948, des concours de sculpture, peinture, architecture, littérature et musique médaillent alors les meilleurs artistes inspirés par le sport.

Passionné par la boxe, Paul Landowski (1875-1961) a travaillé à la réalisation d’une série de sculptures autour de ce sport. Des cinq sujets qu’il souhaitait initialement représenter, le futur créateur du Christ rédempteur de Rio de Janeiro n’en réalisera que deux, le Pugiliste et le Boxeur tombé. Il demande alors au boxeur Georges Carpentier (1894-1975), l’ « un des plus beaux spécimens d'animal humain qui soit », d’être son modèle.

Paul Landowski, Pugiliste, 1920 © Adagp, Paris, 2024, Musées de la ville de Boulogne-Billancourt - Photo Philippe Fuzeau.

Après plusieurs années d’ébauches, Paul Landowski expose une version du Pugiliste en plâtre au Salon des Artistes Français de 1920, l’année même de la consécration du boxeur en tant que champion du monde dans la catégorie des poids mi-lourds. Le sculpteur en a « calmé le mouvement […], pour enlever ce geste de défi qui est dans l'esquisse » et dont il ne voulait pas. En émane un calme olympien contrebalancé par l’impression de puissance toute maîtrisée, contenue dans les poings serrés du boxeur.

La critique alarmée par la nudité du modèle, que tout le monde reconnaît alors, pousse l’artiste à habiller subtilement son athlète d’une feuille de vigne pour les versions réduites tirées par la suite en bronze. Paul Landowski présente, entre autres, une version du Pugiliste au concours de sculpture des Jeux olympiques de Paris en 1924, puis à ceux d’Amsterdam en 1928 où il remporte une médaille d’or !

Paul Landowski, Pugiliste, 1922 © Adagp, Paris, 2024, Musées de la ville de Boulogne-Billancourt - Photo Philippe Fuzeau.

Lors des Jeux de Londres en 1948, les derniers qui accueillent les concours artistiques chers à Pierre de Coubertin, c’est La nageuse qui assure à Hubert Yencesse (1900-1987) une médaille de bronze. Il s’agit là d’une véritable consécration pour cette œuvre d’abord présentée aux Jeux de Berlin de 1936 puis, preuve de son succès, au Salon d’Automne de 1937, au Salon des Tuileries de 1938 et au premier Salon des sculpteurs contemporains en 1939.

Hubert Yencesse, La nageuse, 1936 © Adagp, Paris, 2022, Musées de la ville de Boulogne-Billancourt - Photo Philippe Fuzeau.

Profondément inspiré par les championnes olympiques observées au bord des bassins de compétition, le sculpteur substitue au nu d’atelier immobilisé par une pose, un nu animé par un aplomb naturel et puissant. Le journaliste et critique d’art Raymond Lécuyer (1879-1950) note ainsi pour le Figaro de juin 1938 que « La nageuse d'Hubert Yencesse, dont la gracieuse vigueur n'est pas conventionnelle, a été plus étudiée à la piscine qu'à l'atelier ».

Se coiffant de son bonnet de main, la sportive aux formes fermes se prépare à plonger, les pieds agrippés au bord d’un socle dont elle s’apprête à s’affranchir. « Je veux descendre les statues de leurs socles afin qu’elles se mêlent aux personnages vivants » comme l’explique l’artiste. L’œuvre rend ainsi un hommage vibrant, ni immobile ni gesticulant, à ces femmes qui ont le droit, à partir de 1912, de concourir aux épreuves olympiques de natation.

Hubert Yencesse, La nageuse, détail, 1936 © Adagp, Paris, 2024. Musées de la ville de Boulogne-Billancourt - Photo PL.

 

Philippine Lherbette
Chargée de médiation culturelle