Une porte monumentale à l’Exposition universelle de Paris de 1937

Focus sur une des dernières acquisitions du musée des Années Trente

Une porte monumentale de l’Exposition universelle de Paris (1937)

Le 25 mai 1937 s’ouvre à Paris l’Exposition internationale des arts et des techniques appliqués à la vie moderne, plus connue sous le nom d’Exposition universelle de 1937. Elle se concentre dans un périmètre restreint allant du Trocadéro au Champs-de-Mars en passant par les quais de Seine, de la pointe de l’île aux Cygnes à la place de la Concorde et jusqu’à l’esplanade des Invalides.

Cette grande manifestation rassemble 52 pays exposants et plus de 31 millions de visiteurs. De nombreux édifices sont construits à cette occasion, notamment par les pays étrangers comme l’Allemagne et l’URSS, dont les pavillons se font face dans les jardins du Trocadéro. Si la plupart ont été détruits à la fin de l’Exposition, certains ont subsisté, à l’image du Palais de Chaillot, qui accueille aujourd’hui le Musée de l’Homme, le Musée de la Marine, la Cité de l’Architecture et du Patrimoine ou encore le Théâtre national de Chaillot.

Les expositions universelles offrent une précieuse vitrine en réunissant les artistes et artisans les plus connus de leur temps pour réaliser ces œuvres à vocation éphémères. Ainsi, si l’espace urbain est marqué d’édifices tels que les palais de Chaillot, Tokyo ou Iéna, il faut également guider les visiteurs et leur fournir des repères : c’est le rôle des portes d’accès.  

G. Chevalier, Paris, France. L' Exposition internationale, la porte de l' Alma, A66658,
Musée départemental Albert-Kahn - Département des Hauts-de-Seine.

La porte de l’Alma constitue l'une des entrées principales, idéalement située au centre de l’exposition. Sa construction est confiée aux architectes Marc et Léo Solotareff ainsi qu'à Henri Bard. Point d’accès et de billetterie, elle dessert les rues alentour, mais également le métro, en permettant de parvenir, grâce à des passerelles, aux différentes parties de la manifestation. C’est un défi technique puisque cette porte doit enjamber la place de l’Alma, déjà encombrée par la circulation.

Sa grande originalité tient à son matériau : le bois. Elle a en effet été commandée et financée par l’Office technique d’Utilisation du Bois, qui souhaite remettre au goût du jour ce matériau alors largement concurrencé par le béton ou le fer, davantage privilégiés par les architectes pour leurs constructions modernes.

400 km de planches, 65 km de boulons, logés en 2 millions de trous

La Revue de l’art ancien et moderne, 3e période, tome LXXI, n°377, septembre 1937.

Ce sont donc deux pylônes de plus de 50 mètres de haut qui sont érigés. Le bois, provenant de plusieurs régions françaises, est simplement verni. La partie basse intérieure du pylône nord est décorée de bas-reliefs réalisés par le jeune sculpteur Ernest Morenon. Suivant le thème de l’exposition - l’Art et la Technique -, il réalise "3 figures principales, celles de l’ouvrier qui abat l’arbre, celui qui le débite et celui qui façonne le bois. Les bas-reliefs entourant ces figures illustrent les différentes phases de cette transformation", comme le détaille la revue Art et Décoration en 1937. Cette composition monumentale marque la carrière d’Ernest Morenon et l’esprit de ses contemporains : elle lui vaut une médaille d’or.

   

Bas-reliefs d'Ernest Morenon, Photo C. Duprat, La Revue de l’art ancien et moderne, 3e période, tome LXXI,
n°377, septembre 1937, p. 106. Source : BNF / © Droits réservés. Photo Giquello - Vincent Girier Dufournier.

Artiste peu connu, Ernest Morenon s'est formé à l’École nationale supérieure des Beaux-arts de Paris. Élève de Jules Coutan et Paul Landowski, il a remporté en 1933 le deuxième second Grand Prix de Rome avec Orphée apaise la tempête. Il poursuivit sa carrière aux États-Unis, où il émigra en 1943 et enseigna la sculpture, notamment à Boston.

Grâce à une donation récente de l’Association des Amis du Musée des Années Trente, une version réduite en bois vernis de la Porte monumentale de l’Alma, signée du sculpteur, vient enrichir les collections du musée. Cette maquette, ou plus vraisemblablement œuvre commémorative, atteste de la monumentalité de cet édifice détruit à l’issue de l’Exposition, dont le musée des Années Trente conserve de nombreux autres témoignages comme le paravent Les Plaisirs champêtres de Pierre Bobot.

Chloé Lendroit
Chargée des ressources documentaires

Pour aller plus loin :

  • Pierre Bordier, "Techniques et art du bois", Art et Décoration, 1937, Tome LXVI, pp. 321-323.
  • L'Art Vivant, n° 215, septembre 1937.
  • "Deux entrées de l’exposition", La Revue de l’art ancien et moderne, 3e période, tome LXXI, n°377, septembre 1937, p.105-107.
  • Pascal Pivard, L'Exposition Internationale de Paris 1937 à travers la carte postale, Pivard, 2007.